La Société canadienne de la COVID a envoyé une lettre cruciale à l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario, soulignant l’importance d’améliorer les mesures de prévention et de contrôle des infections dans les milieux cliniques.
Compte tenu de la pandémie actuelle de COVID-19 et de ses répercussions à long terme sur plus de 3,5 millions de Canadiens, la Société insiste sur la nécessité d’adopter des stratégies rigoureuses et fondées sur des données scientifiques pour protéger les patients et le personnel soignant.
Vous pouvez consulter la lettre ci-dessous ou télécharger le fichier PDF.
Le 6 mai 2024
Cher Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario,
En tant que coprésident de la Société canadienne de la covid, un organisme à but non lucratif créé pour lutter contre les séquelles de la COVID-19 dans sa phase aiguë et à long terme, je vous écris pour vous faire part de nos préoccupations concernant le récent projet de politique de l’Ordre des médecins et chirurgiens de l’Ontario intitulé « Prévention et contrôle des infections dans le cadre de la pratique clinique ».
La pandémie de COVID-19 a mis en évidence l’importance d’avoir des mesures rigoureuses de prévention et de contrôle des infections dans les établissements de santé. Avec plus de 3,5 millions de Canadiens qui ont souffert ou qui souffrent actuellement de symptômes à long terme liés à la COVID-19, il est crucial que nous donnions la priorité à la sécurité des patients et des travailleurs de la santé.
Des recherches récentes ont démontré que les virus respiratoires, y compris le SRAS-CoV-2, se propagent principalement par les aérosols qu’émettent les personnes infectées lorsqu’elles respirent, parlent et toussent. Ces aérosols peuvent rester viables dans l’air pendant de longues périodes et parcourir des distances importantes. Des infections, confirmées par séquençage du génome entier, ont été constatées dans des hôpitaux près de cinq heures après que la personne infectée a quitté la chambre. Les transmissions présymptomatique et asymptomatique compliquent également davantage les efforts déployés pour contrôler la propagation de ces virus.
À la lumière de ces résultats, nous demandons instamment à l’Ordre de reconsidérer son projet de politique actuel et d’y apporter les changements suivants :
- reconnaître la responsabilité des employeurs et des établissements de santé dans la planification et la mise en œuvre de programmes efficaces de prévention des infections, plutôt que d’en faire porter la charge uniquement sur chaque travailleur de la santé;
- reconnaître l’importance d’une stratégie globale de lutte contre les infections qui comprend des mesures d’ingénierie comme une ventilation accrue, des systèmes de filtration HEPA ou MERV 13-16, et des zones d’isolement désignées, ainsi que des adaptations des pratiques de travail et l’utilisation d’équipements de protection individuelle (ÉPI), selon la hiérarchie des mesures de contrôle;
- insister sur l’utilisation d’appareils de protection respiratoire correctement sélectionnés et ajustés, comme des masques N95 ou ayant une efficacité supérieure, pour les travailleurs de la santé en contact étroit avec des patients potentiellement infectieux. Les masques médicaux suggérés au point 2.v du projet de politique sont considérablement moins efficaces pour prévenir la transmission d’aérosols;
- établir des critères explicites, fondés sur la science, pour déterminer les mesures de protection appropriées pour des agents pathogènes précis, en tenant compte de facteurs tels que l’évaluation de l’exposition, les vulnérabilités individuelles, et l’ensemble des effets potentiels sur la santé, y compris les séquelles à long terme;
- renforcer les recommandations relatives aux mesures de contrôle à la source, y compris une aération accrue dans les zones de soins aux patients et dans celles non destinées aux patients, l’utilisation accrue des chambres d’isolement des infections à transmission aérienne (CIITA) et l’utilisation proactive d’appareils de protection respiratoire à titre préventif.
De plus, nous aimerions souligner les obligations légales des médecins en vertu de la loi Westray, qui stipule qu’il incombe à quiconque dirige l’accomplissement d’un travail de prendre des mesures raisonnables pour assurer la sécurité des travailleurs et du public. Les directives de l’Ordre doivent garantir le respect de cette loi, en protégeant à la fois les travailleurs de la santé et les patients dans les cliniques.
Faire appel à l’expertise de spécialistes des aérosols, d’hygiénistes industriels, d’ingénieurs en ventilation, d’experts en protection respiratoire, de patients et de travailleurs de première ligne dans le système de santé est essentiel pour développer des politiques efficaces de prévention des infections. Nous recommandons vivement à l’Ordre de consulter ces parties et d’intégrer leurs points de vue dans sa politique finale.
Le fardeau sanitaire que représentent les infections et les réinfections à la COVID-19 dans les établissements de santé est contraire au principe « d’abord, ne pas nuire ». Les populations vulnérables, notamment les patients atteints de cancers, les personnes immunodéprimées et les personnes souffrant de covid longue courent un risque particulièrement élevé de développer des problèmes graves liés aux infections nosocomiales. Il est de notre responsabilité collective de protéger ces personnes et de veiller à ce que les établissements de santé soient sécuritaires pour tous.
Nous demandons instamment à l’Ordre de réviser son projet de politique afin de refléter la compréhension scientifique actuelle de la transmission des virus respiratoires et de donner la priorité à la santé et à la sécurité des patients et du personnel soignant. En mettant en œuvre des mesures de prévention des infections robustes, y compris l’utilisation de respirateurs et de meilleures normes de ventilation, nous pouvons œuvrer à la création d’un système de santé qui incarne véritablement le principe « d’abord, ne pas nuire ».
Nous vous remercions de l’attention que vous porterez à nos préoccupations. Nous sommes impatients de poursuivre le dialogue avec l’Ordre afin d’élaborer des politiques de prévention des infections fondées sur des données probantes qui protègent la santé et le bien-être de tous les Ontariens.
Cordialement,
Dr Joe Vipond, médecin d’urgence
M.D., FCPF, CCMF (MU). B. Sc. (Hon.)
Coprésident de la Société canadienne de la covid
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